« Kite'm Pale » Un film pour sensibiliser

En faisant chuter la prévalence du sida de 6,2 à 2%, en une décennie, Haïti a été considéré comme une « success story » dans la lutte contre la pandémie. Depuis le violent séisme du 12 janvier 2010 et les autres malheurs qui frappaient le pays, on a tendance à oublier le sida, diminué mais pourtant toujours présent. C'est dans ce contexte que le Dr Réginald Lubin annonce « Kite'm Pale », un film sur le fléau. En attendant l'avant-première ce 26 mars au Karibe Convention, Jean Paul François, directeur de production de ce long-métrage répond aux questions de Ticket. Derrière ce long-métrage de 90 minutes film se cachent GHESKIO, USAID et ONUSIDA de la croisade anti-sida.

Comment pouvez-vous présenter, brièvement, ce nouveau film de Réginald Lubin aux lecteurs de Ticket ?« Kite'm Pale » est réalisé par Réginald Lubin, selon un scénario qu'il a signé. Reginald Georges a dirigé la photographie. Emmerson Joseph, Johane Bernalie, Fedie Selan ... sont les acteurs qui ont participé au tournage bouclé en novembre dernier. En résumé, ce film met face à face des gens d'horizons divers et d'expériences différentes, mais qui ont en commun le besoin de partager leur amertume du fait d'avoir été exposé au virus du sida, soit par négligence, par ignorance, par la violence, ou par pur hasard du destin. Ce moment de partage se fera dans une salle de counseling de groupe où, autour d'un conseiller avisé, chacun parlera de sa vie, de ses déboires. Au cours de cet échange de confidences, chacun trouvera sa part de réconfort en sachant qu'il n'est pas le seul à porter un poids lourd, et un moyen de se soulager de cette charge. Ce consensus sera aussi une session d'apprentissage, de mise au point et d'ouverture sur un avenir plein d'espoir. Des séances de confession entrecoupées de questions et de critiques venant des participants, offriront au conseiller l'occasion de guider et d'exposer un ensemble d'alternatives pour une vie meilleure.

Dans quel objectif ce film est conçu et réalisé ?« Kite'm Pale » est un film social qui mettra le doigt dans certaines plaies qui gangrènent notre société et s'efforcera de les amputer. Dans un but précis, ce film vise à ramener à l'ordre tous ceux qui pratiquent des violences conjugales, des actes de viol, etc. Il sera un miroir pour n'importe qui, se trouvant dans de pareilles situations, de se diriger vers une porte de sortie. C'est aussi un moyen de sensibiliser la population, particulièrement les jeunes, sur les réalités cachées de la vie locale, afin d'aider les plus touchés d'en venir à bout.

Combien a coûté la production de ce film ?
C'est un film à petit budget. Le scénario, le décor, la logistique et les lieux de tournage ont tous été définis en fonction de nos moyens. Malgré la marge de manoeuvre rendaient l'exécution de l'initiative très difficile, on a su tout de même boucler avec une enveloppe de quelques cinquante mille (50.000) dollars américains.

Alors, comment vous êtes-vous débrouillé pour assurer un tel projet avec un faible montant, par rapport à vos ambitions ? 
En réalité, « Kite'm Pale » est l'oeuvre de toute une équipe d'acteurs, producteurs, réalisateur, photographe, scénariste et collaborateurs. C'est au prix d'énormes sacrifices que ce film voit le jour aujourd'hui. Car nul n'est bien payé pour le travail qu'il a délivré. Mais avec beaucoup de convictions et d'enthousiasme, chacun a joué son rôle pour y arriver. D'une certaine manière, la qualité du film n'a rien à voir avec le montant budgétaire. C'est un travail professionnel pur et dur que les Réginald, Lubin et Georges, ont consenti pour mener à point cet objectif.

Comment comptez-vous exploiter ce film, vu la fermeture des salles cinéma et tous les enjeux qui règnent autour ?Avant tout, il faut mentionner que ce n'est pas un film à but lucratif. Toutefois, pour assurer sa promotion, le problème de salles cinéma jusqu'alors demeure un obstacle et un grand défi à relever qu'on ne peut ignorer. Dans ce contexte, pour faciliter l'accès au grand public, on a prévu de réaliser des séances de projection dans les grandes villes du pays, même quand on sait que ce ne sera pas suffisant pour autant. Mais on effectue des études de marché pour pouvoir monter un réseau de distribution de films sur tout le territoire national. Néanmoins, la finalité de cette démarche est de vendre le film à un prix dérisoire, pour empêcher quiconque de s'en procurer des copies de mauvaise qualité. Après maintes discutions, certains avouent qu'on risque fort sur ce coup-là, et je les comprends parfaitement. Mais on se trouve dans un carrefour où l'on doit prendre des risques si on veut revenir avec le cinéma. Par ailleurs, depuis quelques temps on a constaté que les gens commencent à s'adapter avec les DVD player, ipod et autres dispositifs pour compenser ce vide. En ce sens, je pense que ceci est un bon signe qui pourrait motiver tout un chacun à acheter les CD en cas de besoin.

Définitivement quelles sont tes attentes pour ce film ?En un mot, on espère que chacun pourra tirer une leçon dans ce scénario, pour que des facettes dissimulées dans la réalité haïtienne se dévoilent au public. Les victimes de telles relations doivent cesser de s'apitoyer sur leur sort, mais pour qu'ils aient le courage de chercher des solutions appropriées pour éradiquer ces abus. Et je souhaite qu'on apprécie l'effort qu'on a fait pour réaliser ce film avec les moyens du bord.

Un messagePour ceux qui n'auront pas l'opportunité de d'assister à cette grande première, je les assure qu'on travaille d'arrache-pied sur l'organisation des séances de projection. Et dans un délai proche les DVD seront disponibles à bon marché.

Dimitry Nader Orisma